Texte : Laurent Pennequin ; Photos : Alexandre Guirao
Passionné par la Maserati Biturbo, Alexandre, fondateur du site ClassicAutoInvest, nous parle de son coupé Biturbo 2.24v de 1990 dont il s’est récemment séparé après 15 ans de vie commune au cours de laquelle il a parcouru 31 000 kilomètres.
Avec l’aide du gouvernement italien, l’entrepreneur argentin De Tomaso, fondateur de la marque automobile qui porte son nom depuis 1965, sauve Maserati d’une mort assurée. En effet, le prestigieux constructeur de Modène a été mis en liquidation au cours de l’année 1975 par son précédent propriétaire, Citroën, qui est alors aussi dans un état moribond.
De Tomaso déploie alors rapidement une nouvelle gamme. Il fait le choix stratégique de proposer deux grandes routières à haute performance permettant de transporter quatre personnes et leurs bagages pour retrouver l’esprit Maserati des années 1960. Les berlinettes Merak et Bora s’effacent peu à peu au profit des deux nouveautés du salon de Genève 1976 : le coupé Kyalami et la berline Quattroporte III. La première est un modèle quasi-jumeau de la De Tomaso Longchamp. Sous le capot, le V8 Ford cède toutefois la place à un V8 Maserati. Sur le plan du style, la Kyalami diffère de la Longchamp par sa calandre, son capot et sa partie arrière retouchée y compris au niveau du pavillon. La troisième génération de Quattroporte reprend la plate-forme de la De Tomaso Deauville avec quelques évolutions, et, en substituant là aussi, le V8 Ford par un V8 maison. Giugiaro signe la ligne élégante de la Quattroporte dont la mise en production est quelque peu laborieuse puisqu’elle ne démarre qu’en 1979.
Ce long préambule permet de mieux comprendre la génèse de la Biturbo. Maserati dévoile son nouveau coupé de grand tourisme en décembre 1981. Avec le coupé Biturbo, De Tomaso veut développer le business de Maserati et gagner de l’argent. La philosophie de la voiture reste celle d’une grande routière pour quatre personnes permettant de voyager vite. La plate-forme et les mécaniques de la Biturbo sont entièrement inédits. Le style s’inspire quant à lui fortement de celui de la Quattroporte III en plus petit. Elle remplace définitivement la Kyalami en 1983.
Au cours de quelques années passées en Italie au milieu des années 1990, Alexandre est séduit par les Maserati Biturbo qui y circulent. Il tombe amoureux de cette voiture qui distille du raffinement et de la performance tout en se voulant discrète.
Mais passion ne veut pas dire déraison, le choix devra porter sur une des dernières Biturbo plus fiables. Les premières versions à carburateur sont donc exclues. Maserati n’avait pas eu les moyens, au cours du développement de la Biturbo, d’équiper son nouveau moteur d’une injection pour son lancement. La voiture devra être postérieure à 1987 pour pouvoir disposer des bienfaits de l’injection.
L’opportunité se présente en 2002. Elle a les traits d’une Maserati Biturbo 2.24v de juillet 1990. D’origine italienne, la voiture en est à son second propriétaire français. Le charme opère. Alexandre est séduit par l’auto : sa ligne, son gabarit compact, ses performances, sa finition luxueuse. Tout lui plaît. Il en devient l’heureux troisième propriétaire avec le plaisir d’accéder à une chose longtemps désirée.
La Biturbo 2.24v affiche alors 89 000 kilomètres. Cette version dotée d’un moteur à injection coiffé d’une culasse à quatre soupapes par cylindre, est une des dernières Biturbo avant leur restyling du millésime 1992. La 2.24v était réservée au marché italien. Son V6, de 2,0 litres, développe 245ch soit un rendement de 122,6 chevaux au litre obtenu grâce aux souffles des deux turbos. Elle dispose de voies plus larges, de roues de 15 pouces et d’une suspension active Koni.
Dès son lancement et pour répondre aux contraintes fiscales italiennes, la Maserati Biturbo reçoit un moteur V6 2,0 litres. Cette mécanique est coiffée de culasses à double arbre à cames en tête, disposant de trois soupapes par cylindre, et suralimentée par deux turbocompresseurs IHI, pour offrir le niveau de performances souhaité. L’intercooler de la version S permet de gagner encore quelques chevaux.
En décembre 1981, une Maserati Biturbo dépasse en performance la Ferrari 208 GTB et son V8 2,0 litres, réservée au marché italien. Ferrari ne tarde pas à réagir en équipant la 208 d’un turbo dès le mois d’avril 1982.
Une Maserati Biturbo peut être conduite par tout le monde. Cette auto se caractérise par sa souplesse, ses reprises et son comportement équilibré. C’est une grande routière polyvalente faite pour abattre de longues distances à une vitesse de croisière de 170km/h sur les autoroutes allemandes, correspondant à un régime moteur de 4600tr/mn.
La Biturbo fait preuve d’un bel équilibre en étant littéralement collée au sol. Cette stabilité démontre qu’elle est faite pour aller vite. Mais la vivacité du châssis peut aussi conduire à des figures non contrôlées derrière le volant de cette propulsion italienne au sang chaud.
Vous cherchez une partenaire de voyage : la Biturbo est dans son rôle. Elle adore transporter quatre passagers et leurs bagages pour des périples dans toute l’Europe. L’auto offre un très bon confort sur de longue distance. Son habitabilité et son volume de coffre sont tout à fait appréciables, et participent à la polyvalence de cette voiture
La garde au sol réduite constitue un inconvénient majeur. Cela implique de rester très attentif aux dos d’ânes, dans les accès au parking et aux sabots de portails.
Comme beaucoup de voitures italiennes, la Maserati Biturbo pâtit d’une insuffisance dans les détails de sa conception. Ceci entraîne des soucis de fiabilité, souvent sans gravité, mais toujours irritant.
Ainsi la Maserati 2.24v d’Alexandre lui a fait deux fois le coup de la panne, nécessitant une intervention de l’assistance dépannage. Lors d’un périple en Italie, la courroie de distribution du moteur saute de son emplacement entraînant une immobilisation immédiate du véhicule. Cette mésaventure n’a pas causé de gros dégâts. Le faible taux de compression du moteur biturbo a été un allié dans cette situation.
La deuxième panne est survenue à la suite du passage d’un dos d’âne. Pour favoriser le caractère vif de sa Biturbo, Maserati a choisi une implantation basse du moteur et une faible garde au sol, ces deux éléments optimisant le centre de gravité. Mais pourquoi avoir logé le capteur point mort haut du moteur au niveau du bouclier avant ? Vous comprenez que le frottement sur le sol a désaxé ce capteur avec pour conséquence un moteur qui a cessé de fonctionner.
Une Maserati Biturbo est une fausse voiture de grande série. Sa complexité fait que son propriétaire doit aimer la mécanique et le bricolage. De nombreux détails de conception montrent que le constructeur transalpin a privilégié la performance à la longévité.
Ainsi cette Maserati affiche des coûts d’entretien proche de ceux d’une Ferrari ou d’une Lamborghini sans en avoir le prestige. Alexandre a calculé un coût kilométrique supérieur à un euro pour son coupé 2.24v. Les nombreux petits problèmes en font une voiture contraignante au quotidien. De plus, les pièces peuvent être difficiles à trouver, la marque n’ayant pas de politique de fournitures pour ses anciens modèles. Il faut donc avoir la foi pour rouler en Biturbo ! Voilà pourquoi elles sont devenues rares désormais.
Allez, on termine avec une bonne nouvelle : la consommation. Celle-ci oscille entre 10,5 et 11,0 litres aux 100km, ce qui est plutôt raisonnable compte tenu du potentiel de l’auto.
Une Maserati Biturbo est une voiture à aimer. C’est une formidable routière qui invite à voyager grâce à sa grande polyvalence.
Ainsi, Alexandre a pu expérimenter sa 2.24v sur les routes verglacées du Jura à l’occasion de vacances d’hiver. Le trajet s’est déroulé sans encombre pour les quatre passagers, leur monture et les skis fixés sur le toit.
Son meilleur souvenir de conduite remonte à 2006, le jour de la finale du Mondial de Football entre la France et l’Italie. Il fallait absolument voir les dernières minutes du match en étant assis devant un écran. Les 150 derniers kilomètres du voyage ont pu être réalisés en quarante minutes sur une autoroute italienne, absolument déserte, à un moment de communion nationale tel qu’une finale du Mondial de Football.
En conclusion, il convient de garder à l’esprit que la Maserati Biturbo n’est pas une berline sportive mais l’inverse… c’est-à-dire une sportive sous une robe de berline. Vous saisissez la nuance ?
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